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La Fonderie : La nouvelle Kunsthalle, un centre d’art contemporain à Mulhouse

Kunsthale_La_Fonderie_Mulhouse
Le nouveau centre d’art aux allures de vaisseau amiral bénéficie d’une situation géographique stratégique.  Jean-Luc Gerhardt travaillait à la préfiguration du Centre d’art. C’est maintenant chose faite, la Kunsthalle de Mulhouse a ouvert en fin d’année 2008 avec un espace d’exposition de 600 m² dédié à l’art contemporain. Situé au cœur du bâtiment de l’ancienne fonderie mécanique réhabilité par l’architecte Christian Plisson, ce bâtiment accueille également une bibliothèque, un restaurant et la faculté de sciences économiques, sociales et juridiques de Mulhouse.

Une version performée du sténopé

A l’occasion du festival Agitato qui se déroule au centre culturel Le Triangle à Rennes, Carole Novak nous propose de venir assister le mercredi 21 mai en soirée à “Une installation-performance pour un seul spectateur à la fois” (Sténopé) et les jeudi et vendredi 22 et 23 mai à “Une performance pour huit spectateurs à la fois” (Chambre noire), les deux premiers volets du Tryptique Camera obscura.

sténopé, Carole Novak

C’est à l’étage du Triangle que les spectateurs sont invités à se rendre pour assister à la performance. Quelques personnes patientent devant la porte. Toutes les cinq minutes une personne entre dans la salle. Un agent d’accueil indique la marche à suivre : il s’agit de remonter la ligne marquée au sol jusqu’au petit trou au travers duquel le spectateur peut observer. Au bout de cette ligne, le spectateur est face à une structure cubique habillée de tissu noir. Le volume semble être habité. Plusieurs éléments permettent au spectateur d’abonder à cette hypothèse, le mouvement de l’air, un souffle, une image, une voix.

- “Vous aimez regarder ?”

Une fois ces quelques mots prononcés, le spectateur a non seulement la certitude d’une présence autre mais il est également renvoyé à sa position de voyeur. La réponse importe peu, la question suffit à le mettre dans cette position. Le spectateur n’est plus seul, il est en compagnie. Comme chez le médecin lors d’un examen oculaire, on ne sait pas exactement ce qu’il faut regarder, où l’œil doit se placer. A l’intérieur l’image apparaît, disparaît, vacille, elle est en suspension dans cet espace clos formé par les pans de tissus. Si l’on s’interroge sur les rapports de la mise en scène avec le titre, on peut reconnaître la présence de l’élément principal, le sténopé. Sa fonction est détournée, il n’est plus l’objectif de l’appareil photographique mais le judas ou le trou de la serrure offrant un possible regard.

La boîte noire ou camera obscura est un des autres éléments nécessaires au discours chorégraphique sur le sténopé. Elle est symbolisée par l’espace clos formé par les quatre pans de tissu. Elle est le lieu où se forme l’image. Ne reste plus que l’image, latente, encore incertaine, flottante qui ne semble pas trouver de lieu pour se fixer. Elle rappelle la qualité de l’image formée par le sténopé. Le mot sténopé n’ayant pas la seule prétention de qualifier ce petit trou par lequel passe la lumière, ici il est à la fois le prétexte de la performance et l’intermédiaire entre réel et représentation. En revanche, l’activation du dispositif n’est effective que lorsque le support capable de recevoir l’image se présente devant le trou. C’est chez le spectateur à la recherche de ce qu’il y a à regarder que se fixe l’image qu’il vole d’un regard.

Le lendemain, l’espace est transformée. C’est à huit que les spectateurs sont conviés à participer à l’expérience.

Carol Novak et David Carquet Camera obscura

Une fois entré, chacun est invité à s’asseoir. Dans la pièce huits petits tabourets carrés sur lesquels sont posés des coussins matelassés sont placés autour d’une table rectangulaire de la même hauteur. Chaque personne a en face d’elle, posée sur la table, une boîte carrée qu’on lui demande d’ouvrir. Dans cette boîte, se trouve un foulard noir brodé que chaque spectateur se met sur les yeux.
L’application du foulard isolent les spectateurs de leur environnent visuel. Ils sont donc plus attentifs à leur environnement sonore. L’expérience peut commencer. L’artiste s’approche tour à tour de ces volontaires et leur prend délicatement la main.

- “Suivez moi”

Carole Novak est chorégraphe et sait appréhender les mouvements du corps de l’autre pour le guider avec assurance dans ce qui semble être un autre espace. Après avoir fait quelques pas et s’être assis, le spectateur est désorienté. Ses repères s’estompent. Il n’a plus conscience du groupe qui participe avec lui à l’expérience. Réflexion faites, les temps où l’artiste semble absente pour l’un des participants sont en réalité des temps où elle est présente pour d’autres. Le spectateur dans l’expectative prend goût à l’attention que lui porte l’artiste. Cette attention est rythmée tout au long de la performance par un passage de l’une à l’autre des huit personnes. Si ni la vue, ni le goût ne sont convoqués dans cette performance, en revanche les quatre autres sens sont à l’honneur.

Quel paradoxe d’évoquer la camera obscura sans ne rien donner à voir !

Carole Novak fait surgir l’image dans l’esprit à l’aide d’associations perceptives. C’est en celà qu’elle fait référence au procédé de la camera obscura. A l’origine, ce procédé est utilisé pour transposer la réalité en trois dimensions dans un espace en deux dimensions mais ne permet pas encore de fixer l’image sur un support matériel. En effet, la découverte du procédé chimique capable de fixer l’image coïncide avec la découverte de la photographie. La Chorégraphe évolue et cite en permanence l’espace de latence inhérent à la création d’une image photographique.

S’il semble que la démarche s’éloigne d’une évocation de la camera obscura, elle est bien dans la création d’une image mentale et persistante. Pour ce faire, elle s’approche et souffle une poudre parfumée et enivrante en direction du visage de chacune des personnes. Au cours de la performance, elle s’approche et se place en face du spectateur. En un espace de temps très court, elle soulève le foulard qui occulte la vue. On n’a plus qu’une image en tête : le visage de l’artiste. Une suite de mot prononcée par une voix enveloppante donne corps à l’espace. D’autres sons, souffles, déplacements, froissements de tissus… délimitent l’environnement dans lequel évolue Carole Novak. Toutes les approches de l’artiste vers le spectateur entrent en relation directe avec les mots prononcés dans la pièce. Bercée dans un monde sensuel, on se laisse submerger. Le temps s’est arrêté.

Encore une fois elle s’approche, et prend le spectateur par la main pour qu’il se lève. Les repères reprennent vie. La présence des sept autres personnes qui participent eux aussi à l’expérience se fait sentir. On a l’impression de revenir d’ailleurs. L’espace dans lequel on se trouve ne correspond en rien à ce à quoi on s’était imaginé. Debout, en cercle autour d’une ampoule rouge, inactinique, chacun se regarde comme pour attester du temps qui vient de s’écouler.

- “Merci pour votre regard”

Sur dailymotion http://www.dailymotion.com/video/x4s86p_le-stenope_creation

je ne sais pas très bien ! commissaire, curator, artistes

Alexandre Perigot, Polska Palace, 2008, Bialystok, Arsenal, © mathieu Harel-Vivier

Si les musées n’ont plus la vocation de montrer les œuvres d’un artiste indépendamment les unes des autres sans que celles-ci s’enrichissent ou se perdent du fait de leur proximité, de leur présence dans un espace où l’œuvre n’est plus seule ; alors c’est peut-être que le commissaire saisit mieux la force d’agencement dont il dispose lors de la réalisation d’une exposition.

L’œuvre n’est jamais seule et ne l’a jamais été. L’histoire de l’art nous renseigne à ce propos. Marcel Duchamp avec une exposition comme celle du surréalisme à la galerie Art of this Century à New York matérialise le lien entre les oeuvres par un fil tendu dans l’exposition. Le changement significatif  que l’on peut relever est peut-être cette prise de conscience des liens qui s’opèrent entre les œuvres d’art d’une exposition, quelle qu’elle soit. Si John M Armleder nie le White Cube avec l’installation Enter at your own Risk et pense le lieu  au titre de l’espace qui va recevoir et interagir avec les oeuvres, il en est d’autres qui pensent la place de l’œuvre dans l’espace, comme Alexandre Perigot qui dans sa dernière version des Palais réalise Polska Palace à Bialystok à la galerie Arsenal en 2008. Cet appartement évolutif qui accueillait autrefois l’image du décor du film Popeye de Robert Altman à la Criée à Rennes est devenu l’écrin de la collection du centre d’art Arsenal. Les pièces des jeunes artistes polonais prennent place sur les cimaises extérieures aussi bien que sur les cimaises en diamètre des plateaux. Aussi, la perception des œuvres n’est jamais la même. L’une et l’autre se rapprochent et s’éloignent comme pour souligner certaines accointances que le mouvement remet aussitôt en question.

voir : Catherine Francblin, Varsovie/Bialystok, Nouvelles perspectives polonaises, février 2008, artpress n° 345, mai 2008, p. 85.

galerie Art & Essai : Le livre

Galerie Art & Essai

En décembre 2007 est publié le livre des 20 ans de la galerie Art & Essai. Celui-ci retrace les vingt ans d’activités de la galerie de 1985 lorsqu’elle n’était pas encore implantée dans les sous sols de la bibliothèque universitaire — à 2005. Ce livre est à l’initiative de Christophe Viart directeur de la galerie de 2002 à 2008. Pour le contenu de cet ouvrage, il contacte une grande partie des personnes qui ont eu l’occasion de participer aux activités de la galerie, que se soit en tant que directeurs, artistes, commissaires, stagiaires, personnels de l’université Rennes 2… Grâce à ces diverses contributions cette publication au parti prix singulier offre un aperçu des expériences vécues à la galerie Art & Essai.

Je vous conseille particulièrement le texte de Pierre Bazantay, vice-président chargé de la culture et de la vie étudiante à l’Université, p 180 intitulé Discours virtuel pour la rétrospective Marcel Duchamp. Pour les adeptes des vernissages les mercredi soirs vous aurez surement deviné la teneur de cette article !

Sommaire

p.7 Préface de Marc Gontard
p.9 Avant-propos : Apprendre et enseigner, faire et voir

p.13 Les formes de l’expérience artistique, Christophe Viart
p.23 Expériences esthétiques et relations critique, Pierre-Henry Frangne
p.31 Le malentendu culturel, Yves Hélias

p.41 Expositions

p.183 Liste des expositions

Imprimé sur les presses de l’imprimerie
Les Compagons du Sagittaire, Rennes
Dépôt légal : décembre 2007
ISBN 2-9525614-2-7

Aperçu p. 170

Du fait de ses caractéristiques proches du fameux cube blanc, la galerie Art & Essai est un de ces lieux qui se prête tout particulièrement à la métamorphose. Julie C. Fortier nous a mis sur la voie lors de l’exposition The end, un lieu devient ce que l’on souhaite en faire. Même si certains éléments comme les quatre poteaux qui ponctuent l’espace, font souvent l’objet d’une pensée pour la réfection du lieu. A l’inverse, pour Julie C. Fortier, ils deviennent des éléments constitutifs du dispositif parking souterrain qu’elle met en scène.
Plus tard, c’est au tour de Richard Fauguet accompagné de son commissaire Christophe Pichon de penser une exposition dédiée à son œuvre graphique. C’est lors de cette exposition plus encore que pour toutes les autres que l’on se rend compte que le montage est un temps où l’on soulève nombres de questions sur les bonnes conditions de monstration d’une œuvre. A tel point que ce moment devient une opportunité pour entrer dans la démarche de l’artiste. Le montage d’une exposition d’œuvres d’art contemporain offre une multiplicité de choix qu’il peut s’avérer utile de connaître pour ensuite instaurer un dialogue entre l’œuvre et le public.
Lorsque l’on parle avec John M Armleder à propos de son intervention à la galerie, il nous parle d’un spectateur « emballé » - mais rien à voir avec Christo -, comme séduit par le dispositif mis en place. Qui n’a pas rêvé se retrouver à la place de l’objet emballé ? Ici, plus que de nous mettre dans cette position, son intervention nous offre une réinterprétation de références classiques qu’il dynamise à l’aide de couleurs pop. Toujours plein d’ironie alors que nous le questionnons sur cette peinture rose sur fond de méduses dont il recouvre cette fois les murs des salles contemporaines du musée des beaux-arts de Rennes, il répond qu’elle pourrait-être le simple fruit de l’imagination du spectateur. Bien sûr, tout le monde sait très bien que l’art contemporain ne supporte aucun autre écrin que le white cube !
Et comme la fin d’une année ne fait qu’annoncer la prochaine, depuis deux ans la Galerie Art &Essai ouvre sa programmation avec une exposition dédiée aux étudiants diplômés de l’École des beaux-arts et de l’Université où ceux-ci peuvent réellement se mettre dans des conditions d’exposition.Mathieu Harel-Vivier, régisseur à la galerie Art & Essai (2005-2006), étudiant, arts plastiques, université Rennes2